Ecran Large est de retour sur la Croisette pour le Festival de Cannes 2025. Et c’est l’heure de parler d’Jafar Panahi, et désormais en bonne place pour la Palme d’or.
L’Iran a remporté la Palme d’or une seule fois dans son Histoire et c’était déjà il y a près de trente ans, en 1997, avec Le Goût de la cerise d’Abbas Kiarostami. Une rareté étonnante tant le cinéma iranien aurait pu glaner le graal cannois ces dernières années entre les films d’Asghar Farhadi (notamment Un héros, reparti avec le Grand Prix du Jury en 2021), Saeed Roustaee (Leila et ses frères en 2022) ou encore Mohammad Rasoulof (Les graines du figuier sauvage, seulement Prix spécial du jury en 2024).
Cela dit, l’heureux élu avait des chances de se nommer Jafar Panahi. Caméra d’or en 1995 pour Le Ballon Blanc, Prix du jury UCR en 2003 pour Sang et Or ainsi que Prix du scénario avec Trois visages en 2018, le cinéaste faisait son retour sur la Croisette en compétition avec Un simple accident. Et pour ses retrouvailles avec Cannes, il a remporté la Palme d’or.
simplement palme d’or ?
Ça parle de quoi ? Après un simple accident, les événements s’enchaînent.
Et c’est comment ? Thierry Fremaux l’avait dit lors de la conférence d’annonce de la sélection cannoise en avril dernier, Jafar Panahi préférait que le public en sache le moins possible sur l’histoire avant de le découvrir. C’est la raison pour laquelle ce synopsis est très court, dissimulant en vérité, un récit d’une très grande richesse. Le cinéma de l’Iranien a toujours été politique depuis ses débuts, lui valant de multiples condamnations de la part du régime (dont six ans après de prison au début des années 2010, effectuées en liberté conditionnelle).
Entre les arrestations pour « propagande », les assignations à résidence, les obligations de rester sur le territoire, les emprisonnements ou les interdictions de faire du cinéma, Jafar Panahi n’a cependant jamais baisser les bras. Au contraire, il a persévéré, tournant de plusieurs clandestinement, dont le très grand Taxi Téhéran, mêlant le documentaire et la fiction, et récompensé de l’Ours d’or en 2015 à Berlin. Et malgré son nouveau age en prison en 2023, le cinéaste a depuis concrétisé Un simple accident.

Il s’agit d’un véritable événement puisque, pour l’occasion, le réalisateur a enfin pu sortir du pays pour présenter son oeuvre au festival de Cannes (où il n’avait pas pu mettre les pieds depuis 2003). Avec son 11e film, il revient plus frontalement à la fiction avec une histoire relatant la lutte complexe des opposants au régime. Difficile d’en parler sans révéler quelques éléments supplémentaires au synopsis, mais Un simple accident suit en fait un groupe d’anciennes cibles du régime qui va chercher à se venger de l’un de ses tortionnaires.
Tout du moins, c’est le point de départ lorsque Vahid, garagiste, croit reconnaître à l’oreille son bourreau (à cause du bruit grinçant de sa prothèse de jambe), le kidnappe, s’apprête à l’enterrer vivant… jusqu’à douter de l’identité de son otage. Car oui, lorsqu’il était sous son joug, il ne l’a jamais vu de ses yeux. Demandant de l’aide à certains amis, eux aussi victimes du même homme, il va ainsi déclencher une petite aventure où, pendant une longue journée et une longue nuit, ils vont tous tenter d’établir la vérité sur son identité.
Avec une mise en scène très minimaliste (souvent des plans-séquences fixes), Jafar Panahi livre ainsi un grand film politique et engagé sur la fragilité des libertés individuelles et les traumatismes de la dictature. Plus précisément, il se sert de son faux-film de vengeance pour pousser ses personnages à se questionner sur la moralité de leurs agissements : Leur geste est-il légitime ? Peuvent-ils utiliser les mêmes méthodes que leur tyran pour se faire vengeance ?
Derrière sa réflexion existentielle motivée par une étude (encore) profonde de la société iranienne, c’est un beau portrait de personnages que dresse alors Un simple accident, plein d’humanisme. En venant de tous les horizons sociaux (une photographe, un garagiste…), Panahi montre à quel point le régime corsète toutes les classes sociales, sans distinction de rang ou de statut (des célibataires, des femmes, des couples). Le cinéaste le sait d’ailleurs mieux que personne, au vu de son é, le film lui permettant, in fine, d’exorciser ses propres traumatismes.
Il en résulte une mise en garde prévenant le régime iranien face la révolte qui gronde, dans les classes populaires, mais pas uniquement. Un avertissement puissant non dénué d’un humour noir qui pourrait coûter cher à Panahi. Lui-même le dit dans Le Monde : « Au pire, ils me remettront en prison » après avoir vu le film. C’est dire son courage.
Et ça sort quand ? Le 10 septembre 2025 au cinéma grâce à Memento.
Je connaissais Taxi à Marseille, à Paris et à New York, je ne savais pas pour Taxi Teheran.
Bizarre, aucun film israélien.