Séries

Karma : critique qui prend Squid Game pour un jeu d’enfants sur Netflix

Par Ange Beuque
4 avril 2025

Un Netflix ses promesses de cruauté et ses personnages aux abois. Alors, bon ou mauvais karma ?

© Netflix

Une construction imparable

Si nos destinées hasardeuses se révélaient aussi finement écrites que Karma, l’existence d’un démiurge ne ferait guère de doute : la grande force de la série, c’est son scénario, assuré par le réalisateur Lee Il-hyung et inspiré d’un webtoon signé Choi Hee-seon. L’histoire débute en douceur, le premier épisode s’attachant uniquement aux déboires d’un endetté chronique (Lee Hee-joon), qu’un investissement malheureux dans les cryptomonnaies va plonger dans un ouragan de mauvais choix… jusqu’à lui faire commettre l’irréparable.

Le récit ne devient choral que dans un second temps en s’ouvrant progressivement sur d’autres protagonistes contaminés à leur tour par ce péché originel. Chacun d’eux aurait pu rester cantonné au rang de personnage-fonction (le complice, le témoin, le docteur…), mais Karma décortique, non sans sadisme, l’impact de l’événement sur leurs existences respectives.

Ton karma qui sait que tu épluchais des chatons dans une vie antérieure

Cette construction méthodique lui permet de prendre le temps de conférer à chacun un espace suffisant, tout en s’autorisant quelques aller-retour temporels visant à éclaircir tel ou tel point de la chronologie sans jamais perdre en fluidité.

Le récit ne cesse ainsi de s’élargir par strates successives, sorte de poupée gigogne dont chaque pièce a été si minutieusement pensée qu’elle s’intègre à merveille dans l’ensemble. Cette rigueur ménage de savoureux (et cruels) rebondissements, aussi imprévisibles qu’imparables, tout au long de ces six épisodes qui ne laissent jamais poindre l’ennui.

Ceux-ci sont alimentés par une mise en scène élégante, qui cache ce qu’il faut (un visage, un complice…) sans jamais donner l’impression de gruger artificiellement le spectateur. La photographie a fait l’objet du même soin, capturant le jaillissement de gouttes de sang avec autant d’application que la semi-pénombre de cet entrepôt dont semblent émerger nos pires instincts.

Cryptomauvais

Une violence qui s’auto-alimente

Évoquer nos pires instincts ne relève pas d’un abus de langage : si la tension de Karma ne retombe jamais, c’est que les trajectoires des protagonistes sont liées par une forte cohérence thématique. Le joli générique et son fil rouge très littéral annoncent la couleur : pas de fantastique « à la Sense 8 » ici, ce qui unit les personnages, c’est la dynamique sous-jacente de leurs bassesses.

Karma étale leurs fêlures, leurs laideurs, leurs compromissions. Comme dans Squid Game, l’argent en constitue souvent le moteur, traduisant à leur manière une préoccupation majeure (les ménages sud-coréens comptant parmi les plus endettés du monde). Arnaques, chantage et meurtres crapuleux se succèdent, composant un petit nuancier du crime qui confère à la série de faux-airs d’étude de mœurs nihiliste.

Guillaume Canet et Marion Cotillard

Du délinquant aux abois à l’odieux connard opportuniste, chaque personnage contribue à entretenir une spirale de violence qui finit par s’auto-alimenter… jusqu’à leur revenir en boomerang. Karma joue de son concept pour ménager de jubilatoires retours de flamme (parfois très littéraux) à coups de coïncidences et autres accès d’ironie tragiques.

Quelques traits d’humour grinçant renforcent le sentiment de vanité qui se dégage de ce petit théâtre de l’absurde. Une tombe creusée à coups de clubs de golf, un pied nickelé lourdingue, un lot de consolation amer constituent autant de ruptures de ton bienvenues qui exhaussent par contraste la cruauté de l’ensemble.

Karma est disponible sur Netflix depuis le 4 avril 2025

Rédacteurs :
Résumé

Les qualités d’écriture de Karma lui vaudront de parader aux côtés des Squid Game et Stranger Things parmi les plus beaux succès de Netflix. Enfin, si le karma existe…

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SaulGood
SaulGood
il y a 1 mois

Plus que Squid Game, je dirais que c’est plus un « Sex Crime », sans le sexe.. Que j’avais aimé ado pour ses rebondissements cyniques toutes les 5 min, et qui me laisserait de marbre comme cette série que je n’ai malheureusement pas pu finir. Il en faut pour tous les gouts, tous les ages.