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Cannes 2025 : on a vu Die My Love, un cauchemar psychologique radical avec Jennifer Lawrence

Par Alexandre Janowiak
18 mai 2025
© Black Label Media

Ecran Large est de retour sur la Croisette pour le Festival de Cannes 2025. Et c’est l’heure de parler de Robert Pattinson.

La Britannique Lynne Ramsay est un pur produit cannois. Son premier court-métrage, Small Deaths, avait reçu le prix du jury du court-métrage 1996. Depuis, tous ses longs-métrages sont és par la Croisette. Ce fut d’abord à Un Certain Regard en 1999 avec Ratcatcher, puis à la Quinzaine des cinéastes en 2002 avec Le Voyage de Morvern Callar.

Un tour de chauffe avant son arrivée en compétition pour la Palme d’or avec We Need to Talk about Kevin en 2011, A Beautiful Day en 2017 (lui valant un prix du scénario) et désormais Die, My Love avec Jennifer Lawrence et Robert Pattinson (et produit par Martin Scorsese).

Un extrait de Die, My Love

Femme au bord de la crise de mère

De quoi ça parle ? Dans un coin de campagne perdu, une jeune femme, Grace (Jennifer Lawrence), lutte contre ses démons intérieurs quelques mois après être devenue mère.

Et ça vaut quoi ? Lynne Ramsay n’a jamais facilité la vie de ses protagonistes entre le pré-ado de Ratcatcher, la fausse-écrivaine du Voyage de Morvern Callar, la mère déée de We Need To Talk About Kevin ou l’ancien marine devenu tueurs à gages de A beautiful day. Au contraire, tous ses personnages existent dans la douleur, la souf, essayant désespérément de retrouver un sens plus joyeux ou un simple sentiment de stabilité, de répit, à leur vie respective.

Rien d’étonnant donc à voir l’Ecossaise adapter Crève, mon amour de l’Argentine Ariana Harwicz, suivant une héroïne instable, non pas au bord de la crise de nerfs mais en plein dedans. Dès les premières minutes, avec une brève scène de sexe torride dans une maison à l’abandon entre Grace et Jackson (Robert Pattinson), une ellipse où le couple élève son bébé, sans ion, et les images d’une forêt s’embrasant, le programme est presque planté, notamment grâce à la mise en scène de la cinéaste.

die, my love jennifer lawrence robert pattinson
La première scène du film

Le premier plan du film est un long plan fixe large suivant l’arrivée de Grace et Jackson dans leur nouvelle maison. Un équilibre qui suppose une certaine sérénité conjugale et un relatif apaisement. Il s’agit toutefois d’un leurre, d’une rareté, d’une quasi-anomalie au coeur du dispositif de Die, My Love. Avec une radicalité déconcertante, le film va au contraire, basculer dans une instabilité permanente pour mieux capturer, à l’état ultra-brut, tous les sentiments de son héroïne.

Entre une caméra régulièrement en gros plan, proche des corps, des visages, des émotions (sublimée par la photo de Seamus McGarvey), mais aussi un montage abrupt (incroyable travail de Toni Froschhammer) et une ambiance sonore écrasante (signée Paul Davies), Die, My Love plonge les spectateurs dans une expérience viscérale et étouffante, accentuée par le format 4:3. Et comme le tout est parfois ponctué d’éclats de violence et de morceaux musicaux inattendus, il est franchement difficile d’en ressortir indemne.

Jennifer Lawrence tout bonnement incroyable

Car Lynne Ramsay livre ainsi un véritable cauchemar psychologique (et psychosexuel vu la libido débordante de Grace), une psychose où réel et hallucination fusionnent dans un feu éternel d’amour, haine, violence, douleur et démence. Mais plus encore, en nous enfonçant dans les abîmes de l’esprit torturé de Grace, la cinéaste offre une méditation harassante sur la dépression post-partum, la maternité et les injonctions contradictoires subies au quotidien par les femmes (via la société, la famille…).

De par son intensité dérangeante, sa radicalité déstabilisante et son tourbillon émotionnel, Die, My Love a d’ailleurs clairement quelque chose du jusqu’au boutiste Mother! de Darren Aronofsky. C’est d’autant plus le cas avec la présence de Jennifer Lawrence, obsédante, dans un rôle où elle se jette à corps perdu et à âme meurtrie. Elle instille tout au long du récit une sensation de malaise de plus en plus persistant, face à un Robert Pattinson exceptionnel en mari impuissant.

C’est assurément l’un des meilleurs rôles de l’actrice américaine et déjà la favorite pour un prix d’interprétation cannois. Tout du moins, si le film fait son oeuvre auprès du jury, tant sa folie, son cran et sa liberté pourraient diviser.

Et ça sort quand ? Pour l’instant, Die, My Love n’a aucun distributeur et donc aucune date de sortie.

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cidjay
cidjay
il y a 15 jours

Ah… le 4:3 !
On aura beau dire mais c’est le meilleur format actuel pour avoir de magnifiques bandes noires sur les côtés de l’écran… (qui, selon les artistes, instaure une sensation d’oppression ou permet de souligner la verticalité de certains plans). Je suis pressé d’avoir des films en mode vertical comme une vidéo Tik-Tok (le sentiment de confinement et d’oppression sera encore plus grand)
(mode sarcastique OFF)

Prisonnier
Prisonnier
il y a 16 jours

En voilà un qui me tente. Étant fan de Mother le sujet s’en rapprochant quelque peu, j’en suis

dutch
dutch
il y a 17 jours

En espérant que ce sois mieux que « le challenge ».