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Rocky IV : Rocky Vs. Drago – match nul pour le director’s cut de Sylvester Stallone

Par Déborah Lechner
17 mars 2022
MAJ : 18 mars 2022
Rocky IV : photo Rocky IV

Sylvester Stallone a terminé son director’s cut de Rocky IV, qu’il a très subtilement baptisé Rocky IV : Rocky Vs. Drago, et sans surprise, c’était dispensable.

S’il a décidé (ou s’est résolu) à lâcher le personnage de Rocky Balboa, qui sera donc absent de Rocky IV: Rocky Vs. Drago.

 

 

WHY SO SERIOUS ?

Qu’on l’aime ou le conspue pour ces raisons, Rocky III – est un divertissement neuneu, dans lequel tout est excessif et caricatural, et qui exsude toute la mégalomanie de Stallone. Tenter de faire un film sérieux et premier degré à partir d’un bon gros plaisir coupable était donc un match perdu d’avance.

Pourtant, en ajoutant plusieurs plans et répliques, en utilisant des angles de caméra différents et en coupant par-ci par-là, le film gagne effectivement en nuance et mesure, notamment dans son traitement moins niais et dichotomique de la Guerre froide. En dépit de cette note d’intention, l’histoire, elle, n’a pas changé et son propos sur les saintes valeurs américaines non plus. Le film, comme son protagoniste patriotique et musculeux, reste un pur produit reaganien, impossible à réorienter ou dépolitiser.

 

Rocky IV : photo apollo creedLiving in America, comme le résume James Brown

 

Pour crédibiliser son film, Stallone a également renié l’existence de Sico, le robot controversé de Paulie. Comme si toute l’exubérance et le kitsch du film tenaient à ce seul robot, qui en est plutôt une parfaite synthèse. Les morceaux de la bande-son (qu’on adore, pas de malentendu), les montages des entraînements, Rocky qui grimpe une montagne parce que c’est le plus fort, la virée nostalgique en Lamborghini ou encore « cette imagerie à la Flashdance » comme Stallone l’a lui-même décrite… Tous ces autres éléments symptomatiques des années 80 sont toujours présents dans Rocky vs Drago, qui conserve donc sa patine surannée, mais ne l’assume plus de façon aussi drôle et décomplexée.

Pire, les changements plus subtils sont contrebalancés par des effets de style plus grossiers et clichés, comme l’ajout d’un monologue en voix off lors du combat final ou le age en noir et blanc des flashbacks sur No Easy Way Out. À moitié délesté de sa surenchère jouissive, le director’s cut se prendre donc trop au sérieux, sans pouvoir être le drame qu’il prêtant être, ni le divertissement régressif qu’il était de base.

 

Rocky IV : Photo Rocky IV2 Fast 2 Serious 

 

CREED IV

On peut concéder que les retouches ont permis à Drago (Talia Shire) retrouve une place plus affirmée auprès de Rocky.

Des changements qui seraient d’autant plus bienvenus si le film n’invisibilisait pas en même temps d’autres personnages. À commencer par Paulie, un des visages emblématiques de la saga, dont le temps d’écran a été drastiquement réduit à cause des scènes coupées du robot. En tout, le film propose près d’une quarantaine de minutes plus ou moins inédites, mais une durée quasi identique à la version originale

De la même manière, Rocky Jr., qui n’avait déjà pas beaucoup de scènes, n’en partage plus qu’une seule avec son père, qui ne lui souhaite même pas un joyeux Noël dans son discours de victoire et laisse complètement de côté ses obligations parentales. Ce qui est assez dommageable pour une version qui se veut plus émotive et intimiste. Ayons également un mot pour Ludmilla, la femme de Drago campée par Brigitte Nielsen (accessoirement l’ex-femme de Stallone), que le réalisateur a presque entièrement gommée de sa copie, même si pour le coup, ce n’est pas vraiment une grosse perte.

 

Dolph Lundgren : Photo Sylvester Stallone, Rocky IVDernière manche

 

La nouvelle version a également recentré le récit sur l’amitié d’Apollo et Rocky, en donnant plus de place à leur relation et en l’approfondissant, mais aussi en versant dans un sentimentalisme mielleux et forcé avec son introduction corrigée qui se ree les scènes qu’ils partagent dans Rocky III. Même le discours de fin, qui ciblait d’abord la foule soviétique avant d’entrer dans un message universel en guimauve, revient ici à la mort d’Apollo.

Tout est fait pour exacerber l’image du guerrier en mal de guerre, le combat contre Drago étant plus une obligation morale et existentielle qu’une vengeance et réaction épidermique après la mort de son ami, ce qui était finalement un sentiment plus vrai et humain. Si Rocky IV n’en faisait peut-être pas assez là-dessus, Rocky vs Drago en fait assurément trop.

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Hocine
Hocine
il y a 3 années

Je n’ai pas encore vu le nouveau montage de Rocky IV. Je pense que je le verrai par curiosité. Pour moi, les meilleurs Rocky restent les deux premiers et le sixième. Rocky III et Rocky IV sont probablement les plus jouissifs et spectaculaires.

Cela dit, y a-t-il un réel intérêt à remonter Rocky IV ou tout autre film ? Si Sylvester Stallone n’avait pas toute la liberté artistique de faire le film à l’époque, je comprendrais mieux sa démarche. Maintenant, si c’était juste pour améliorer un film qu’il considère rétrospectivement peu réussi voire raté, ce serait plus discutable. Les imperfections des films sont paradoxalement utiles: elles permettent notamment de mieux mesurer l’évolution de l’oeuvre d’un cinéaste.
Lorsqu’un cinéaste ou ceux qui en possédent les droits remontent un film qui était à l’origine, mutilé à l’insu du réalisateur, la démarche est plus louable, à mon humble avis.
Par exemple, certains films de Sam Peckinpah, La Porte du Paradis de Michael Cimino ou Il Était Une Fois en Amérique de Sergio Leone.
Beaucoup de cinéastes estiment qu’une fois les films sortis, ils ne leur appartiennent plus.

Kyle Reese
Kyle Reese
il y a 3 années

@Barracuda

C’est dingue ça. Je viens de faire une petite recherche et SICO est le seul robot a être membre de la Screen Actors Guild. Et du coup il reçoit des royalties, enfin son créateur. C’est complètement fou.

Akemi
Akemi
il y a 3 années

Relisez vous… Autant des etourderies ou des fautes de frappes ca e, mais confondre « prétend » et « prêtant » c’est grave…

Vincent (the goat)
Vincent (the goat)
il y a 3 années

Discours aussi simpliste que l’œuvre que tu attaques, du coup! c’est beau!
Ben ouais, ça reflète son époque, l’Amérique conquérante de Reagan! Et?
Tu crois que le spectateur de l’époque n’en était pas conscient? Qu’il ne savait pas faire la part des choses?
Le capitalisme est bien plus sournois et omniprésent de nos jours qu’à l’époque de Rocky IV. Les blockbusters contemporains sont bien plus nocifs pour nous à notre époque que dans les 80’s!
Et puis j’en ai plein le luc des personnes qui critique le capitalisme ( à raison) mais qui ont les derniers joujous des gafas en leur possession ( je ne te vise pas, rassure-toi!).

Pi
Pi
il y a 3 années

Étrange impression après la vision de ce director’s cut. À la base je n’aime plus les Rocky à partir du 3 car comme les Rambo, ce n’est plus qu’une recette faites des mêmes ingrédients visant à obtenir toujours les mêmes effets pour un public qui attend son quart d’heure d’entraînements virilistes à base de torses huilés et développé en boîte. Exit le drame social des années 70, bienvenue dans l’Amérique des gagneurs des années 80.

Ce Rocky IV est juste un concentré d’idéologie capitaliste et impérialiste au premier degré. Même James Brown n’y est plus qu’une marque vide de sens, un produit vieillissant reproduisant les mêmes gimmicks suranné venant servir la soupe à un contenu réactionnaire.

Bref, ce film est une merde. Et même remonté, même augmenté, même ré-étalonné, ça reste une merde. Une merde que j’ai vu, jeune, au cinéma et une merde que j’ai revu plus tard en vidéo et là, dans sa version Cut pour voir si Stallone était encore, quelque part, un artiste, ou juste un business man capitalisant pour ses vieux jours en remuant la bouillie de sa gloire ée.

Si avec le premier Creed, Stallone était revenu à ce qui avait l’intérêt de Rocky lors du premier film, très rapidement, on a resombré dans la recette à biftons.

Ben, ce Rocky Vs Drago n’apporte rien de plus, j’ai eu même l’impression que c’était pire, que le film au lieu de finir sur une apothéose de débilités visuelles à base de patates de forain démultipliées – il n’y a aucun respect pour la boxe dans ce film – comme dans la version originale, ça finit n’importe comment, PAF ! générique de fin.

À voir pour l’aspect historique de la licence, donc par curiosité cinéphilique et rien d’autre.

Barracuda
Barracuda
il y a 3 années

Pour le robot c’est une question de droits il fallait repayer pour une nouvelle utilisation ce sui a conduit à le couper lui et les scènes ou il apparaît.

Emynoduesp
Emynoduesp
il y a 3 années

J aimais bien le robot. C etait con mais avec Paulie, ca faisait le job.

Je reproche plus son manicheisme a deux balles a ce film que Robby le robot et Paulie le clodo.

Rambo v Terminatorovitch, c est ca le vrai titre.

GuyLuxor
GuyLuxor
il y a 3 années

Ta prose, c’est beau comme du Simon Riaux.

rientintinchti
rientintinchti
il y a 3 années

beaucoup de fanboys pour ce film de propagande bas de gamme pour rednecks et attardés incontinents

Ghrty
Ghrty
il y a 3 années

Ce film est l’un de mes préférés de la saga et des années 80 malgré tout ses défauts… nombreux! Une madeleine de proust, un doudou cinématographique, un portoloin vers mes premières séances en salle… au-delà de toutes critiques donc! Du coup, envie mais pas trop de découvrir ce nouveau montage.