Présenté en compétition à Cannes, Ari Aster l’avait vu venir.
Depuis le succès d’Hérédité, Ari Aster s’est imposé comme l’une des nouvelles voix ionnantes du cinéma américain indépendant. Après Midsommar, le cinéaste s’est éloigné de ses premières amours du côté de l’horreur pour aller vers une idée du choc plus abstrait avec Beau is Afraid. En tout cas, il reste chez Aster une inquiétude, des angoisses qui se transcrivent chez ses personnages asociaux, confrontés à un monde au bord du gouffre qu’ils comprennent de moins en moins.
Avec Eddington, le cinéaste signe à la fois son film le plus chaotique, mais aussi le plus limpide. On est en pleine période du Covid, face à un shérif aux tendances MAGA (Joaquin Phoenix) qui se présente aux élections municipales face au maire sortant libéral (Pedro Pascal). Alors que les points de vue se multiplient, que les théories du complot et les élans de violence se superposent, Ari Aster parle en premier lieu d’une Amérique fracturée et paranoïaque, où tout le monde en prend pour son grade.
Même au sein de la rédaction d’Ecran Large, le film a divisé, et Ari Aster s’attendait à ce que sa présence en compétition n’engendre pas des retours unanimes.

Eddington d’avis différents
Interrogé par le New York Times, Ari Aster est revenu sur la réception d’Eddington. Bien qu’il ne faille jamais se contenter des agrégateurs d’avis, le film a pour l’instant un score de 67% sur Rotten Tomatoes. Pour le cinéaste, son faux western allait forcément créer des avis polarisés, notamment sur le plan politique.
« Je ne lis pas les critiques pendant que je fais de la promotion ici [en ], parce que je me connais et ça peut vite devenir une spirale infernale. Donc je reste loin de ce que les gens ont dit jusqu’à ce que je parte. Je savais ce que je faisais, et on se doutait que le film allait diviser. »
L’une des données d’Eddington, c’est de renvoyer dos à dos ses personnages conservateurs avec ses protagonistes plus libéraux et progressistes, avec l’envie de se moquer de tout le monde, de refléter une absence de communication des deux côtés. Justement, le journaliste du New York Times explique à Ari Aster que plusieurs avis récoltés reprochent au film d’être plus dur avec ces figures « de gauche » qu’avec ses personnages ouvertement trumpistes.
« Je ne vois pas l’utilité de prêcher pour sa paroisse. Je m’intéresse à autre chose, la prise de recul. je pense qu’on est tous dans la même situation : on est impuissants, on a peur et on a été coupé de la possibilité de changer le monde, de l’idée qu’il y a une force pour contrebalancer le pouvoir. »
Pour se faire sa propre idée, il faudra voir Eddington à partir du 16 juillet dans les salles françaises.