Le Voyage du Dr Dolittle : critique super spéciste

LA FERME LES ANIMAUX

Repoussé deux fois pour finir programmé au mois de janvier, soit le cimetière à blockbusters ratés de l’industrie hollywoodienne, Le Voyage du Dr Dolittle avait déjà des airs de monstre de Frankenstein, Stephen Gaghan ait horrifié les producteurs. Accompagné d’une promotion discrète, pour ne pas dire embarrassée, le film débarque donc avec des airs d’inexorable naufrage.

Et en effet, le bâtiment prend l’eau de toutes parts. Pour le coup, il paraît évident que son metteur en scène initial n’était pas l’auteur idéal pour porter ce récit, mais tout indique ici que le projet était vicié dès sa conception. C’est bien simple, rien ne va dans cette intrigue qui ne trouve à aucun moment son rythme, pas plus qu’elle ne parvient à arrêter une tonalité. Le récit enchaîne les saynètes aux airs de mauvais sketch, forçant par endroit le récit à accélérer inutilement, quand il ne se délite pas sans raison valable.

 

« Vers le fond vert et au-delà ! »

 

Sans doute à cause de son tournage chaotique, le film donne, comme beaucoup d’autres blockbusters contemporains, le sentiment d’avoir été exécuté dans la précipitation.

Pour quelques plans qui flattent la rétine, on ne compte plus les incrustations foireuses, les doublures numériques voyantes, ou tout simplement les gags foutus par terre par des personnages numériques incapables de conférer à leurs actions un tempo comique digne de ce nom. Les blagues lourdingues s’enchaînant comme des perles, le visionnage vire progressivement au supplice, lequel fait preuve d’une sophistication inédite dans la douleur dès qu’apparaissent les deux personnages enfantins, vibrants plaidoyers pour la vasectomie.

 

« Oula, ça sent pas bon cette critique quand même »

 

IRON CRADE

Envisagé comme une suite de contraintes à empiler puis rassembler au sein d’un même produit, chaque ingrédient joue contre les autres. Ainsi, un discours (pas malvenu d’ailleurs) sur les traumas et la nécessité de les accepter ne peut se développer, scène d’action mollassonne oblige. La touche de mélancolie initiale, distillée par le veuvage du héros, est soudain balayée pour le laisser gesticuler mollement.

Un entracte merveilleux est charcuté pour laisser Antonio Banderas claudiquer en maharadjah suant de la margarine, et Robert Downey Jr. la tronche enfarinée et traitée à la terracotta, fait subir les derniers outrages à l’accent britannique.

 

Quand il faut bien payer les traites de la piscine

 

Et c’est d’ailleurs lui le premier problème du Voyage du Dr Dolittle, ainsi que l’emblème de son échec. Bien sûr, Stephen Gaghan, réalisateur de Syriana, manifestement peu préparé à une entreprise de divertissement massif, est pour beaucoup dans le ratage, mais c’est finalement la partition atone de l’interprète d’Iron Man qui choque.

Ni bon, ni mauvais, Downey Jr. est à l’image de l’industrie hollywoodienne actuelle : un ramassis de concepts tièdes, penser autant pour ne pas segmenter que pour er le temps, une sorte de charentaise humaine, qui n’a pas vu de vermifuge depuis trop longtemps.