Doctor Who saison 15 : critique d’un Docteur déjà fatigué sur Disney+

Doctor Smile

Le Docteur nouvelle génération, incarné par le pétillant Ncuti Gatwa, est encore et toujours la colonne vertébrale de cette saison de Doctor Who, peut-être même plus encore que la première. Toujours aussi attachant, l’acteur donne tout ce qu’il a et est la principale attraction de la série. D’autant qu’il évolue sur un terrain plus libre, et peut enfin exploiter le potentiel dramatique de son personnage, notamment dans une scène ultra intense du sixième épisode.

Si on avait assez peu de doutes sur le Docteur, son compagnon était une autre histoire, après le départ inattendu de l’actrice Millie Gibson à la fin de la première saison. L’actrice Varada Sethu (vue dans Andor notamment) prend sa place dans le rôle de Belinda. Un personnage qui montre rapidement une belle complicité avec le Docteur, mais qui n’arrive jamais à se défaire de l’étiquette de remplaçante.

Une impression renforcée par le retour de Gibson en milieu de saison et dans le final, qui éclipse totalement la nouvelle colocataire du Tardis. La série peine toujours à développer ses personnages secondaires, plus concentrée sur la manière d’amener de la fraîcheur dans ses épisodes. Une mission que s’est clairement fixée Davies au moment de reprendre les rênes de la série.

Ainsi, dans la lignée de la saison précédente, Doctor Who propose des épisodes très différents les uns des autres, dont certains vraiment amusants. On pense notamment à Lux, qui se déroule dans une salle de cinéma des années 50 avec des idées de mise en scène inspirées, ou à cette improbable Eurovision de l’espace, tellement en phase avec l’univers kitsch et purement british de la série.

Un œil sur le é

Sur le plan pur du visionnage, la plupart des épisodes de cette deuxième saison se regardent sans mal, avec quelques coups d’éclat vraiment bien sentis. Pourtant, la construction générale du récit est toujours aussi bancale, voire pire que dans la première saison de Gatwa. Une bien mauvaise surprise, car l’accroche est réussie, et le fil rouge simple et efficace, du moins dans un premier temps.

Il y a la sensation d’un projet aux coulisses très tumultueuses, où on ne comprend jamais vraiment le placement des épisodes ou le choix des sujets. Peut-être est-ce la présence de Disney à la production qui motive la présence encombrante de UNIT dans la série, en vue d’un possible spin-off ? En tout cas, on ne peut pas dire que l’organisation, sorte de SHIELD à la sauce anglaise, apporte grand-chose à l’ensemble.

Globalement, les aventures hebdomadaires du Docteur semblent dénuées de la profondeur émotionnelle ée. À force de vouloir renouveler la formule, on peut même se demander si la série n’a pas perdu un peu de l’essence qui la rendait si spéciale. Doctor Who ressemble à une simple série de SF aux concepts toujours plus compliqués. Surtout, elle semble avoir oublié que le cœur de son récit était son duo de protagonistes.

Cette fraîcheur a du bon, évidemment. La décision de laisser sur le côté les monstres classiques (les Daleks, les Cybermen…) reste bienvenue. Cependant, non seulement la série s’embourbe dans des messages d’intérêt général inclus à la truelle (qui ont toujours fait partie de son ADN, mais qui ici donnent un peu envie de s’arracher les yeux), mais elle est également étrangement marquée par une pulsion éiste très contradictoire, qui trouve son apogée dans un final alambiqué.

Pot de départ surprise

Cette saison très inégale s’achève donc avec le départ complètement soudain de Gatwa dans la peau du Docteur. Manifestement un choix de l’acteur, motivé par l’hésitation de Disney à poursuivre sa collaboration avec la BBC. Le problème, c’est que cette saison 2 n’était clairement pas écrite comme un adieu au Quinzième Docteur, comme le veut la tradition de Doctor Who.

En résulte un final en deux parties très confus, avec quelques bonnes idées mais surtout beaucoup de questions sans réponses. Comme dans la première saison, Davies ramène un méchant venu des tréfonds de la série originale (on parle des années 70) pour affronter le Docteur, avec en filigrane un nouvel élément de scénario sorti de nulle part.

Tout sent l’improvisation dans le dernier épisode, qui se noie dans une conclusion interminable et incompréhensible en vue d’expliquer l’inévitable régénération. On accordera au moins à la série un cameo sympathique (et une petite rédemption méritée). Surtout, le seul qui réussit à rendre ce départ crédible est bien Ncuti Gatwa, dont les dernières minutes dans le rôle cimentent toutes les belles promesses que son incarnation portait, et qui restera comme une profonde frustration.

Un instant sincère immédiatement plombé par un gimmick inutile, avec le retour incongru d’une ancienne star de la série (oui, encore). Doctor Who semble terrorisé à l’idée d’avancer, alors que c’était l’idée même de cette nouvelle version chapeautée par Davies. Tout un paradoxe symbolisé par ce final décevant. Ncuti Gatwa méritait certainement mieux, et Doctor Who mérite assurément un vrai renouveau.

La saison 15 (ou 2 de la troisième série) de Doctor Who est disponible en intégralité sur Disney+ depuis le 31 mai 2025.