Quand on parle de catch et de cinéma, on pense généralement aux reconversions de John Cena ou Dave Bautista, mais pas forcément aux films produits ou coproduits par la WWE (la World Wresting Entertainment). Et ce n’est peut-être pas plus mal.
Il existe une porosité naturelle entre le catch et le cinéma étant donné que la discipline mêle des performances physiques à de la théâtralité (les personnages, les scénarios) et de la scénographie (les costumes, les entrées, les chorégraphies, etc.). De fait, de nombreux athlètes ont déjà fait des allers-retours entre les vestiaires et les plateaux de tournage, pour jouer les guest stars comme Hulk Hogan dans Rocky 3, Shawn Michaels dans L’Arme fatale 4, Triple H dans Blade 3 ou Steve Austin dans Expendables, ou pour jouer les vedettes, souvent dans des films de mauvais goût et/ou plutôt anonymes : Les trois ninjas se déchaînent, Abraxas, gardien de l’univers, Retour à l’action, Banlieue interdite…
Et puis il y a la partie encore plus immergée de l’iceberg : WWE Studios alias l’usine à navets qui rivalise sans mal avec Asylum. Si ça peut paraître obscur, surtout pour celles et ceux qui ne s’intéressent nullement au catch, des noms comme Halle Berry, Mike Flanagan, Florence Pugh et encore Nathalie Baye n’y sont pourtant pas étrangers.

GOTTA CATCH ‘EM ALL
À la fin des années 80, Vince McMahon, alors président de la WWE (à cette époque baptisée WWF), la plus grosse compagnie de catch actuelle, a une idée pour faire entrer l’entreprise dans une nouvelle ère : partir à la conquête d’Hollywood. Et ce n’était pas bête du tout, surtout avec une personnalité comme Hulk Hogan en guise d’égérie et panneau publicitaire. Avec son look, son attitude et ses catchphrases, le catcheur était devenu un véritable personnage de fiction pleinement ancré dans l’imaginaire collectif grâce à sa Hulkamania. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il avait fait une apparition mémorable dans Rocky 3 quelques années plus tôt.
Pour financer son projet, Vince Mcmahon sort donc huit millions de dollars de sa poche. C’est de cette façon qu’est né Cadence de combat (No Holds Barred en VO), produit par Shane Distribution Company, l’ancêtre des WWE Films, renommés WWE Studios en 2008. Sauf que le film, distribué en salles par New Line, est une véritable purge, une relecture à peine dissimulée de Rocky 3 qui se fait détruire par les quelques critiques qui ont osé poser les yeux dessus.
Le New York Times, par exemple, n’a pas mâché ses mots à l’époque :
Plus que Sylvester Stallone ou Arnold Schwarzenegger, M. Hogan se comporte comme un personnage de bande dessinée qu’il aurait lui-même inventé et qui aurait pris vie. Cadence de combat est aussi caricatural que sa star.
En dépit de cette mauvaise presse, le film encaisse miraculeusement plus de 16 millions de dollars au box-office, confirmant au age l’aura et l’influence de celui qu’on a surnommé… Hollywood Hogan. Cet échec critique constitue cependant un croche-pattes sur la ligne de départ pour Vince McMahon, qui garde malgré tout l’idée d’investir le grand écran dans un coin de sa tête.

CAN YOU SMELL WHAT THE ROCK IS COOKING ?
En 2001, le très populaire Dwayne Johnson alias The Rock, alias The People’s Champ, alias The Most Electrifying Man in Sports Entertainment décroche un petit rôle dans Le Retour de la Momie. Un si petit rôle qu’on pourrait même parler de caméo, mais un caméo de luxe qui mérite une place en gros sur l’affiche à côté de Brendan Fraser et de Rachel Weisz. À ce moment-là, Universal sent bien que la Superstar est un argument commercial poids lourd, et signe donc dans la foulée un spin-off centré sur son personnage : Le Roi Scorpion, sorti en 2002.
Vince MacMahon, qui avait une revanche à prendre sur Hollywood et la vie, flaire lui aussi la bonne affaire, et décide donc de s’engouffrer dans la brèche en tant que producteur exécutif. Cette fois, c’est le jackpot ! Le film encaisse 180 millions de dollars dans le monde et marque la naissance des WWE Studios (alors nommés WWE Films). La compagnie poursuit son nouveau business de coproduction avec deux autres films, toujours portés par The Rock : Bienvenue dans la jungle de Peter Berg en 2003 et Tolérance Zero en 2004, un remake du film Justice sauvage de 1973.

Mais c’est déjà le début de la descente aux enfers pour la société de production, puisque les deux films se rétament au box-office. Pire encore, en 2005, Dwayne Johnson rompt son contrat avec la WWE pour poursuivre sa carrière d’acteur (avant de faire officiellement son retour en 2011 et d’entamer sa célèbre rivalité avec John Cena). Forcément, il faut se rabattre sur d’autres Superstars.
Trois films sont donc lancés. Le premier à sortir, et à être entièrement produit par la WWE, est le film d’horreur médiocre Le Regard du diable aussi connu sous le titre See No Evil, avec Kane qui joue un tueur en série (et un réalisateur dont les principaux faits d’armes étaient dans le porno et les thrillers érotiques).

Puis il y a eu The Marine, énorme plaisir coupable et parodie involontaire de [insérer n’importe quelle série B d’action des années 90] avec John Cena dans ses débuts d’acteur, bien avant The Wall de Doug Liman, Fast & Furious 9 et 10 ou The Suicide Squad. Il a d’ailleurs poursuivi en 2009 avec 12 Rounds, réalisé par Renny Harlin, qui – fait assez rare pour le souligner – a été un deuxième petit succès avec plus de 17 millions de recettes pour 7 millions de budget.
Le troisième est The Condemned, une sorte de sous-sous-Battle Royale (le film, pas le type de match) avec Steve Austin, autre très grosse star du catch. Cette production est alors un gros coup de poker pour le jeune studio, avec un budget record de 20 millions de dollars et bien trop d’espoir, puisqu’elle a fait un autre méchant bide en salles (8 millions de dollars au box-office), non sans s’attirer de nombreuses critiques railleuses.
ATTITUDE ADJUSTMENTS
Malgré leur échec en salles, la plupart des films se sont plutôt bien vendus ou loués en DVD. The Marine aurait notamment généré plus de 30 millions de dollars supplémentaires sur le marché vidéo. C’est donc le plan B tout trouvé pour la firme, qui dès 2009 se met à polluer les bacs à DVD des supermarchés, d’abord pour En territoire ennemi 3 : Mission Colombie (coproduit et distribué par la Fox avec qui ils avaient signé un accord pour 4 films, dont 3 DTV).
S’en est suivi un déferlement de propositions toutes plus embarrassantes et WTF les unes que les autres, qu’aucune curiosité morbide ne devrait braver. On peut citer les comédies Un catcheur au grand coeur avec Big Shaw, The Chaperone avec Triple H, Bending Rules avec Edge ou Buddy Games avec Sheamus (pour les débuts de Josh Duhamel derrière la caméra). Les actionners fauchés sont aussi légion, en particulier les cinq (!) suites de The Marine, sans John Cena.
Et comment ne pas citer les films de Noël Jingle All the Way 2 et L’Assistant du père Noël, la comédie chrétienne The Resurrection of Gavin Stone ou les films d’animation Scooby Doo! WrestleMania Mystery et Les Jetsons et les Robots Catcheurs de la WWE…

Mais du coup, où sont Mike Flanagan et Nathalie Baye dans cette histoire ? Plus très loin. Dès 2010, WWE Studios a aussi commencé à produire ou coproduire des films sans rapport avec le catch ni Superstar au casting, et ce dans tous les genres : du drame (That’s What I Am, avec Ed Harris); du post-apo (The Day avec Shawn Ashmore et Dominic Monaghan); de l’horreur (No One Lives avec Luke Evans ou Leprechaun Origins); du thriller (Dead Man Down avec Colin Farrell et Noomi Rapace); des arts martiaux (La Naissance du Dragon sur la jeunesse fictive de Bruce Lee); des supers-héros (Sleight de J. D. Dillard); un musical de country (Pure Country: Pure Heart avec Shawn Michaels) et évidemment, de l’action (par exemple Road to Paloma réalisé et joué par Jason Momoa).
On vous laisse digérer ces infos ou faire quelques recherches sur Google.

Dans ce déferlement, quelques coproductions ont un peu plus tiré leur épingle du jeu avec l’envie de faire des films plus sérieux (et plus sérieusement), notamment The Call (un thriller honnête avec Halle Berry), le sympathique The Mirror de Mike Flanagan, Une famille sur le ring avec Florence Pugh et The Rock, et en l’étonnant Les Reines du ring dans lequel Marilou Berry, Nathalie Baye, Audrey Fleurot et Corinne Masiero montent une équipe féminine de catcheuses et claquent des DDT, avec quelques demi-caméos de Superstars.
Depuis qu’ils ont abandonné leur rêve d’étoile sur le Hollywood Walk of Fame, les WWE Studios (et plus globalement la WWE) ont trouvé un compromis entre les rayons DVD et le grand écran : Netflix. Un accord signé en 2019 prévoit que la compagnie de catch produise des divertissements familiaux et grand public à destination de la plateforme. C’est le comment du pourquoi derrière Le catcheur masqué de 2020, dans lequel un enfant trouve un masque de luchador qui le transforme en catcheur professionnel, ou encore le film fantastique interactif Escape The Undertaker.
Roddy Piper est bon dans le rôle de John Nada dans « Invasion Los Angeles ».
En on a eu un catcheur champion d’Europe qui a bien réussi sa conversion vers le cinéma :
Un taxi pour Tobrouk, Les Tontons flingueurs, L’Armée des ombres, Le Clan des Siciliens, Garde à vue, Les Misérables… pour n’en citer que quelques uns.
MArran que vous ne parliez pas de Dave Bautista avec les Gardiens de la galaxie ou Dune par ex.
Il y a aussi un cameo sympa de Randy « Macho Man » Savage dans le premier Spider-Man de Sam Raimi (le catcheur Bonsaw)
Une famille su le ring, c’est un film intéressant qui retrace la vie de la catcheuse Paige et franchement, c’est loin d’être un film infamant.
Les reines du ring, le film est plutôt drôle, même si la fin fait un peu un flop, mais toute la construction est bien avec des bonnes actrices françaises.
Pour moi, ce sont les deux bonnes propositions de films. Les autres, on tournera pudiquement la tête
J’avoue que j’aime beaucoup the Condemned et See no Evil qui remplissent parfaitement leur rôle de bon petit divertissement
En effet, The Marine était un sacré plaisir coupable de soirée entre potes. Surtout dans sa version québécoise.
« Je suis un meuhwine ! »
Vous ne mentionnez même pas Rabid avec Phillip Jack Brooks. Les suites de 12 Rounds, c’était avec Randy Orton et Dean Ambrose
Que les catcheurs/catcheuses soient des déjà des acteurs sur les rings et qu’ils aient des physiques hors normes les poussent naturellement vers le cinéma. Malheureusement ils ont rarement été exploités avec efficacité et bon goût. Dommage.