LA MÉMOIRE DANS LA VIEILLE PEAU
On peut au moins reconnaître à Absolution sa malice. Dès la première scène, énième variation du petit film de gangsters, un Liam Neeson hagard fixe un crabe en train de mourir par terre. Un petit malfrat parle de lui comme d’une vieille relique, tandis que l’autre répond que « Ce mec, c’était vraiment quelque chose à l’époque ». C’est là que Liam Neeson et sa moustache se réveillent, et menacent de péter les épaules (oui oui) du petit malin qui le prend pour un vieux crouton ayant é la date de péremption.
Mais il y a effectivement un problème. Dans Absolution, Liam Neeson incarne un homme qui perd la tête, atteint d’une maladie neurodégénérative qui touche sa mémoire, et qui est la conséquence de tous les coups qu’il s’est pris dans la tronche. L’ironie étant qu’il a déjà plus ou moins joué ce rôle : dans Sans identité (sorti en 2011) où il essayait de reprendre son identité suite à une petite amnésie, et surtout dans Mémoire meurtrière (sorti en 2022 sur Amazon Prime Video) où il était un tueur à gage atteint d’Alzheimer.
Est-ce un hasard si cet acteur désormais perdu dans un tunnel de séries B post-Taken joue encore un personnage qui se demande ce qu’il fout là ? Et qui paye ici le prix de ses exploits de héros d’action, comme s’il avait usé son capital castagne ?
MELANCHOLIA
A partir de là, il y a presque deux films qui commencent, et ils sont tous les deux tragiques à leur manière. Il y a l’histoire de cet homme qui s’efface sous ses propres yeux, et il y a ce « Liam Neeson Movie » qui n’en est pas un, mais cherche absolument à ne pas perdre le public qui aurait été berné par l’affiche et les quelques lignes de pitch.
Evidemment, le premier est nettement moins barbant que le deuxième. Parfois, il arrive même à faire croire qu’il sortira du lot parmi les 3/4 de la filmographie de l’acteur de ces quinze dernières années. C’est principalement parce que le réalisateur Hans Petter Moland, qui avait déjà dirigé Liam Neeson dans le sympathique mais oubliable Sang froid, s’attarde souvent sur le vide, le silence, et les moments de rien. Il filme ce personnage confronté à sa fin imminente, et d’une certaine manière il raconte quelque chose de l’acteur, à ce stade de sa carrière, embourbé dans une suite sans fin de rôles et films copiés-collés. Réduit à une coquille vide, comme ce vieux gangster qui tourne en rond, et crie et tape dans le vide.
C’est aussi fin que la moustache de Liam Neeson (les scènes de rêve), mais il y a quelque chose de beau et mélancolique dans ce renoncement et cette résignation. Même la miette d’histoire d’amour est traitée avec cette profonde tristesse du temps qui est insurmontable, comme si tout était désormais un crépuscule, et que le comédien y disparaissait un peu plus à chaque mauvais film.

LIAM NEESON NI À FAIRE
Mais à moins d’être de très bonne humeur ou membre du fan club de Liam Neeson, tout ça reste bien maigre dans le programme archi-basique d’Absolution. Le vieux boxeur reconverti en homme de main d’un mafieux (joué par un Ron Perlman qui a rarement été aussi transparent) va devoir renouer avec sa fille et son petit-fils, et sur sa route il croisera une femme qu’il sauvera d’un petit ami violent dans un bar et une prostituée désespérée qui attend d’être sauvée. C’est tellement en pilotage automatique que toutes ces scènes racontent mille fois moins que les instants de silence, lesquels sont pourtant parfaitement scolaires.
Entre deux ou trois scènes tellement nulles qu’elles en deviennent hilarantes (il suffit du sourire d’une gamine dans la rue pour ravaler une envie de se flinguer), Absolution tente péniblement de fournir quelques moments d’agitation qui semblent exister uniquement pour la bande-annonce et la promo, afin de rameuter les fans de sous-sous-Taken qui frétillent dès que Liam Neeson sort une arme ou gesticule entre deux plans où sa doublure monte les marches d’un pas rapide.

Le cahier des charges devient triste à en pleurer, et la dernière demi-heure de cet interminable film (environ 2 heures, et probablement 45 minutes de trop) enfonce toutes les portes ouvertes.
Entre d’autres mains, avec un minimum d’ambition et un disciple de James Gray par exemple, Absolution aurait peut-être été une belle tragédie, sur la fin d’un cowboy des villes qui crève dans ses bas-fonds. Là, c’est simplement une nouvelle entrée dans la minable et interminable liste de la Liam Neesonxploitation.
Absolution est disponible sur Amazon Prime Video en depuis le 28 novembre 2024
Toujours triste de voir un grand acteur se perdre dans des films alimentaires à la fin de sa carrière mais c’est souvent le lot de tous les acteurs. On ne peut être et avoir été.
Je ne perdrai clairement pas mon temps à le regarder, mais j’ai apprécié la lecture de votre critique au moins. C’est assez dommage de le voir s’enfoncer dans ce type de rôle… Et quelle horreur cette affiche !