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La Gravité : critique d’un film fantastique français étonnant

Par Mathieu Jaborska
2 mai 2023
MAJ : 4 mai 2023

En 2017, Steve Tientcheu.

La Gravité : photo, Max Gomis, Steve Tientcheu

Attack the block

Depuis 2019, année du succès critique et populaire impressionnant des Misérables (plus de deux millions d’entrées tout de même), l’intérêt du cinéma français pour la vie en banlieue a pris des formes très diverses, du film d’action (Bac Nord) au trip esthétique (Athena), en ant par l’expérimentation nihiliste (La Tour), non sans quelques débats nécessaires sur la représentation de ces espaces et de leurs habitants. Fanny Liatard et Jérémy Trouilh ont même décidé de flirter avec la science-fiction dans le très joli Gagarine, preuve qu’il est possible de concilier réflexion politique et envies de cinéma populaire.

La Gravité va bien plus loin encore. Il raconte l’histoire des retrouvailles tendues de trois connaissances dans leur quartier d’enfance, après la peine de prison de l’un d’entre eux. Jusqu’ici, rien de trop fantasque. Sauf que ce grand retour se déroule sous de sombres auspices : un imminent alignement des planètes modifie les règles de la gravité, tandis qu’un gang de jeunes du coin se faisant appeler les Ronins patrouille dans les rues et s’inspire de la culture pop japonaise pour assoir sa domination. Heureusement, le trio n’est pas dépourvu de ressources, pour le dire simplement et sans divulguer quoi que ce soit.

 

La Gravité : photo, Max Gomis, Steve TientcheuQuand t’arrives dans la grotte des Zarbi

 

Cédric Ido revendique les influences de Kurosawa et Misumi (dixit le dossier de presse), suit ses personnages de gamins organisés dans leur délire nippon, sans pour autant perdre de vue la tangibilité sociale de ses protagonistes, jusqu’à un climax pour le moins déconcertant, puisqu’il lorgne très franchement sur le premier The Raid de Gareth Evans (si, si). Le tout dans une ambiance pré-apocalyptique soulignée par la photographie de David Ungaro. Un mélange des genres improbable et progressif, représentant le conflit de générations qui motive les enjeux du film.

 

La Gravité : photoKids united

 

Gravity rush

C’est à la fois la plus grande qualité et le plus gros défaut du long-métrage. D’une part, le cinéaste maitrise ses références, au point de proposer quelques chorégraphies galvanisantes et plusieurs beaux moments de mise en scène une fois le fantastique assumé. Ainsi, à l’instar de Gagarine avant lui, il réintègre les habitants de la banlieue et leurs propres problèmes dans une culture populaire commune, comme pour accomplir avec le cinéma ce que les pouvoirs publics ont raté au fil des années. Et rappeler au age que la science-fiction grand public est souvent un moyen d’interroger l’ordre social contemporain, y compris en .

D’autre part, La Gravité rebutera quiconque est allergique aux récits qui reposent trop sur la symbolique. Il s’articule entièrement autour de parallèles et métaphores, au risque d’ailleurs de er outre la caractérisation de certains personnages, quand bien même Max Gomis, Jean-Baptiste Anoumon et Steve Tientcheu sont tous assez bons dans leurs registres.

 

La Gravité : photoTeam bleue vs Team rouge

 

D’autant que les quelques allégories surnaturelles qui cohabitent dans l’intrigue gagnent en puissance visuelle ce qu’elles perdent en subtilité. Un compromis évident dans les touchants derniers plans du film, explicitant l’idée d’une gravité qui empêche les banlieusards de s’extirper de leur environnement et des galères qui vont avec.

Tout juste peut-on rappeler que Cédric Ido, ayant lui-même grandi dans la banlieue de Stains, connait son sujet. Contrairement à certains de ses confrères, il évite ses représentations les plus apathiques, allant d’ailleurs jusqu’à mettre en scène un monde en vase clos, qui n’a que très peu de avec les unités politiques qu’on lui oppose généralement. Sa perspective est donc très intéressante et sincère, à défaut d’être parfaitement articulée.

 

La Gravité : Affiche française

Rédacteurs :
Résumé

Un mélange des genres étonnant qui mise énormément sur le symbolisme pour relayer ses (bonnes) idées.

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FAFA
FAFA
il y a 2 années

Très bon film !!! je le conseille à tous le monde!! il y a plusieurs messages subliminaux ou pas cela change de tous les films de banlieue qu’on voit!! le jeu d’acteur est magnifique

Loozap
Loozap
il y a 2 années

J’aime bience film c’est très réaliste, on s’y reconnaît

Tauphraim
Tauphraim
il y a 2 années

Je l’ai vu en avant-première au festival Grindhouse Paradise à Toulouse. J’ai beaucoup aimé, une ambiance très particulière et un mélange des genres très réussi. Cédric Ido était aussi présent et il était très inspirant dans ce qu’il a voulu montrer dans son film lorsqu’il y a eu les questions/réponses à la fin de la scéance.

Bleh
Bleh
il y a 2 années

Mélange des genres qui avive la curiosité, ça fait toujours plaisir des films français qui osent ce genre d’acrobatie cinématographique. En espérant que le résultat soit au niveau.

Rémi
Rémi
il y a 2 années

Ma curiosité est piquée…